Le consortium EPI (European processor initiative) complémente le premier programme. Lancé en mars dernier, son objectif est d’arriver à construire un superordinateur complètement européen, pour l’entièreté de ses composants et logiciels. La pièce manquante principale est le processeur de calcul, pièce maîtresse s’il en est.
Au vu de l’évolution géopolitique, ce programme n’est pas isolationniste : la plupart des supercalculateurs utilisent aujourd’hui des processeurs AMD, Cavium, Intel ou encore NVIDIA — uniquement des sociétés américaine. La Chine s’est aussi lancée dans le même genre de programme, avec Tianhe-2, suite au refus du gouvernement des États-Unis de leur fournir les puces nécessaires. L’Europe n’est pas à l’abri d’un tel camouflet, surtout avec les relations actuellement tendues. Le Japon, historiquement, n’utilise que des puces développées “en interne” et cette tradition se perpétuera avec le Post-K.
Les choix techniques sont loin d’être posés, vu l’âge du projet. Cependant, deux architectures ressortent du lot : RISC-V, complètement libre ; ARM, entièrement commerciale (et, accessoirement, anglais). Réaliser des processeurs x86 n’aurait pas beaucoup de sens, vu qu’il n’existe pas de programme de licence — contrairement à ARM, puisque les développeurs de l’architecture conçoivent certains cœurs, mais n’en fabriquent pas : ils n’ont pas d’autre choix que d’offrir un programme de licence. De plus, le fabricant français de superordinateurs Atos a une certaine expérience avec l’architecture ARM, de par son projet Mont Blanc par exemple. OpenPOWER serait un candidat raisonnable, au vu de sa licence, mais aucune entreprise ne s’est risquée à un développement dans un cadre HPC en Europe.
Deux types de processeurs seront développés : l’un plutôt pour les superordinateurs (assez générique), l’autre aussi pour les voitures (pour accélérer plus spécifiquement certaines opérations, comme l’inférence dans les réseaux neuronaux). Ils n’utiliseront pas forcément la même architecture (on pourrait voir le premier en ARM et le second en RISC-V), mais seront développés en parallèle pour réduire les coûts. Les machines déployées utiliseront une architecture modulaire, chaque partie étant spécialisée dans un type de calcul.
Le projet prévoit d’aller vite : la première génération de puces devrait être prête vers 2020-2021, avec les premiers systèmes (qui n’atteindront probablement pas l’exaflops) entre 2021 et 2022. La deuxième génération pourrait arriver deux ans plus tard, vers 2022-2023, des machines d’un exaflops devant arriver dès la fin 2023. Pendant ce temps, les processeurs pour l’automobile devraient être disponibles comme prototypes dès la fin 2021 et comme produits finis dès la fin 2024.
Le projet sera financé à hauteur de cent vingt millions d’euros par les pouvoirs publics, vingt-trois partenaires industriels et chercheurs investiront aussi leurs moyens. On compte notamment Atos (assembleur de machines), BSC, CEA, Jülich Supercomputing Centre (trois centres de recherche hébergeant des superordinateurs) et STMicroelectronics (fabricant de semiconducteurs),
Sources : European Program to Develop Supercomputing Chips Begins to Take Shape, European Processor Initiative: consortium to develop Europe’s microprocessors for future supercomputers.